Douleurs et Instabilité de la rotule

Il s’agit d’une inflammation non seulement du cartilage de la rotule lors de son passage sur le fémur, mais aussi des éléments stabilisateurs de cette même rotule ; tendon quadricipital, ailerons rotuliens et tendon rotulien. Si le passage de la rotule lors des mouvements de flexion extension de la rotule ne se déroule pas de manière satisfaisante, il va en résulter un déséquilibre qui va d’abord entraîner des douleurs puis éventuellement des dégâts cartilagineux.

Les douleurs prédominent en avant du genou, gênent dans les escaliers, sur terrain inégal, à la station debout ou assise prolongée. Parfois, un épanchement et/ou des craquements peuvent survenir. Il n’y a souvent pas de vraie instabilité (les luxations sont rares), par contre une appréhension peut parfois être ressentie (avec épisodes de pseudo-blocages).

Tout ceci est dû à une souffrance du cartilage rotulien avec chondromalacie (ramollissement et œdème), et parfois même une véritable lésion. Mais il n’y a pas de relation absolue entre l’importance de la dégradation cartilagineuse et l’importance des douleurs.

En effet, la rotule glisse normalement sans contrainte sur le fémur au cours de la flexion du genou, maintenue par des haubans musculaires et fibreux. Lors de sa course, la rotule à elle-même des mouvements propres : latéraux, rotatoires autour d’un axe vertical et de bascule autour d’un axe horizontal. Les contraintes cartilagineuses varient donc et se déplacent au cours de la flexion.

On comprend dans ces conditions que tout déséquilibre des structures de cette belle « mécanique » puisse entraîner une instabilité dont les conséquences sont une hyperpression sur le cartilage de la rotule et/ou du fémur puis finalement une inflammation voire une usure.

Les causes anatomiques de cette l’instabilité fémoro-patellaire doivent donc être recherchées pour guider le traitement :

Les causes musculaires :

Ce sont les principales causes de l’instabilité fémoro-patellaire. Il s’agit probablement à l’origine d’une asymétrie de croissance entre le squelette fémoro-tibial et le système extenseur (quadriceps, rotule et expansions latérales, tendon rotulien).

Il s’ensuit une rétraction de ces éléments ayant tendance à subluxer la rotule en externe.

Les causes osseuses :

Le système extenseur a un angle tendon quadricipital-rotule-tendon rotulien en valgus d’environ 15° (angle Q ou bascule externe de rotule). Cet angle est normal en extension et se corrige pour atteindre 0° en flexion.

La malposition latéralisée de la tubérosité tibiale antérieure ou un valgus du genou risque d’augmenter cet angle, entraînant l’instabilité externe de la rotule.
La position de la tubérosité tibiale antérieure peut être établie par la distance TAGT (distance tubérosité tibiale antérieure et gorge trochléenne), fournie par le défilé radiographique rotulien, ou le scanner. Cette TAGT est en moyenne de 12 mm..

A noter que ces deux causes musculaires et osseuses peuvent être associées.

Autres causes (inflammation sans malformation+++) :

* sur-utilisation ou erreur d’entrainement chez le sportif : musculation sur genou fléchi (squatts, poids et charges en distal sur les membres).

* malposition du genou due à un problème sus-jacent (rachis, hanche) ou sous-jacent (jambe, pied)
Ce problème est très fréquent et concerne deux types de populations : Les adolescents et les adultes jeunes pour lesquels le pronostic est bon sans traitement chirurgical. 2 formes sont individualisées :

* la forme idiopathique (sans cause apparente) : la plupart du temps il s’agit d’un déséquilibre entre la musculature antérieure et postérieure de la cuisse. Ce genre de problème survient principalement lors de la croissance. Le fémur en grandissant entraîne dans sa croissance les muscles qui ne vont pas réagir de la même manière. Progressivement peuvent s’installer des rétractions ou un déséquilibre de force en les muscles antérieurs « le quadriceps » et les muscles postérieurs « les ischio-jambiers ». La rotule, petite pièce osseuse mobile va subir de plein fouet ce déséquilibre à l’origine de douleurs quelquefois très importantes, notamment en externe (syndrome d’hyperpression fémoro-patellaire externe de FICAT).

* la forme post-traumatique survient à la suite d’un choc direct sur la partie antérieure de la rotule. Il évolue dans la plupart des cas favorablement, mais l’évolution est longue.
Il faut éviter pendant toute la durée de l’évolution une surcharge rotulienne et se méfier des manoeuvres de rééducation active contre-résistance.

Les examens radiologiques ne sont pas systématiques, surtout dans les cas récents :

* Les radios permettent de voir la forme de la rotule ainsi que sa position mais ne permettent pas de voir le cartilage de la rotule. Dans l’immense majorité des cas, ce n’est vraiment pas la peine d’en faire plus. Une bonne vieille radiographie donne déjà beaucoup de renseignements ! Les radios permettent de voir la forme de la rotule ainsi que sa position mais ne permettent pas de voir le cartilage de la rotule.

* L’arthrographie et l’arthroscanner permettent d’analyser les lésions de la surface du cartilage, mais la plupart du temps, le syndrome rotulien ne s’accompagne que d’un œdème du cartilage, sans lésion de surface : on ne prescrit ces examens qu’en présence d’un cas inhabituel ou résistant au traitement médical, d’autant qu’il s’agit de procédures plus agressives avec injection d’un produit de contraste dans le genou. Ils permettent parfois de distinguer une entorse du genou d’une luxation de rotule.

* L’IRM analyse surtout les ligaments et les ménisques : elle n’a pas d’intérêt dans le syndrome rotulien

Traitement :

Le traitement est essentiellement préventif : il faut éviter les mouvements qui déclenchent les douleurs :
* accroupissement ou grandes flexions du genou, nage en brasse,
* marche en montagne, vélo (surtout si la selle est trop basse), marche en montagne.
* modulation des activités chez le sportif, et dans certains cas un arrêt complet momentané du sport. On doit

remettre en question l’entraînement et rechercher des erreurs dans le type de préparation
Le traitement médical comprend des antalgiques, éventuellement des anti-inflammatoires. Dans certains cas très spécifiques, on pourra envisager des infiltrations, voire d’une viscosupplémentation (injection d’une sorte de gel améliorant l’état de surface du cartilage).

Quelquefois, un programme de rééducation est envisagé. Dans ce cas relativement simple, la kinésithérapie va reposer sur des étirements et sur un renforcement des groupes musculaires les plus faibles. Il faut éviter durant la kinésithérapie de travailler en dynamique avec des poids par exemple. Le port d’une genouillère rotulienne peut s’avérer utile. Il est indispensable d’effectuer ensuite à la maison des exercices que le kiné vous aura montré si l’on veut que le résultat se maintienne.

Enfin encore plus rarement le chirurgien proposera une arthroscopie pour « faire le ménage » s’il existe par exemple des clapets cartilagineux à l’origine de blocage douloureux.
L’évolution est souvent constituée de poussées douloureuses, avec nécessité d’un traitement médical lors de ces périodes. La reprise de séance de kinésithérapie peut alors être utile. Si la kinésithérapie n’est pas efficace ou même si elle est douloureuse, c’est qu’elle a été mal faite ! N’hésitez pas alors à changer de praticien ou à consulter de nouveau un spécialiste.

Le passage a à la chronicité est rare, souvent engendré par les soucis professionnels ou familiaux ou par l’usure progressive des surfaces articulaires du genou chez le sujet mûr, pouvant conduire à intensifier le traitement médical (orthèses, infiltrations de corticoïdes, viscosupplémentation) ou à envisager dans de rares cas, après une sélection rigoureuse, une prise en charge chirurgicale.

Dans certains cas, il existe une malformation de la rotule et/ou de la gouttière dans laquelle elle glisse sur le fémur. On parle alors de dysplasie. Elle peut être légère mais aussi quelquefois sévère. Le cas le plus simple est représenté par les rotules trop hautes.

La rotule est placée trop haut par rapport à la gouttière fémorale dans laquelle elle glisse (cette zone fémorale s’appelle la trochlée). Quand le genou commence à fléchir, la rotule à des difficultés à s’engager dans la trochlée et peut même quelquefois glisser à coté. C’est la luxation de rotule qui mime une grosse entorse de genou.
A la période aigue, le genou est rempli de sang avec une douleur externe (la rotule a cogné sur le fémur) et une douleur interne (déchirure de l’aileron rotulien). Le traitement consiste en une immobilisation de quelques semaines suivie d’une rééducation assez longue.

Lorsque la dysplasie est sévère (rotule haute et/ou trop plate, trochlée pas tout à fait assez creusée), le phénomène aura tendance à se répéter un peu trop souvent ou trop facilement. Dans ces cas, il va falloir intervenir pour stabiliser la rotule. En fonctions des cas, le chirurgien pratiquera :

Une section de l’aileron rotulien externe au mieux sous arthroscopie (lateral relase), ce qui apporte un soulagement dans un certain nombre de cas mais l’efficacité de cette procédure reste irrégulière et discutée

Une réparation des ligaments internes détendus (MPFL).

* un simple abaissement de la rotule (transposition de la tubérosité tibiale) éventuellement associée à une retension de certains éléments musculaires internes. Cette chirurgie est assez lourde (cicatrice, grosse rééducation…) et doit être bien réfléchie avec votre chirurgien.

 

Finalement, ces interventions chirurgicales ne doivent être proposées qu’exceptionnellement et seulement après échec des traitements conservateurs bien conduits.

Chez les sujets plus mûrs (parfois 45/50 ans, le plus souvent à partir de 60 ans) il faut considérer trois formes de douleurs rotuliennes :

  1. L’arthrose fémoro-patellaire survient sur une instabilité rotulienne ancienne ou un déséquilibre ancien longtemps bien supporté. La majorité de ces patients présentent une usure du compartiment externe et une subluxation externe de leur rotule. Cette arthrose fémoro-patellaire isolée est très longtemps bien supportée et le traitement est médical et kinésithérapique (étirements, renforcement des ischio-jambiers,
    physiothérapie). Le traitement chirurgical est rare car les résultats sont très inconstants (patellectomie partielle externe, régularisation d’ostéophytes, transposition-avancement de la tubérosité tibiale). Certaines techniques sont mêmes quasi abandonnées (spongialisation de rotule). Enfin, dans certains cas extrêmes, on pose une prothèse isolée de la rotule si le reste du genou est bon.
  1. Le syndrome fait partie intégrante d’une dégradation globale du genou (d’origine inflammatoire ou mécanique) avec usure progressive de toutes les surfaces articulaires (fémoro-patellaire mais aussi fémoro-tibiale interne et externe), conduisant à l’arthrose (disparition des cartilages des trois compartiments). Dans ce cas, le syndrome rotulien n’est qu’un épiphénomène. Il faut traiter le problème dans son ensemble et si le traitement médical ne suffit pas, il faudra poser une prothèse totale de genou.
  1. Les douleurs s’inscrivent sur un genou déjà prothésé, que la rotule ait été changé ou non :

Conclusion :

Ce problème est très fréquent, surtout chez les jeunes gens et le pronostic est bon :

Le traitement chirurgical doit rester exceptionnel et ne concerne que les lésions du cartilage (arthroscopie de « nettoyage ») ou les anomalies de centrage de l’appareil extenseur responsables de luxations récidivantes de la rotule (transposition de la tubérosité tibiale envisageable dans ces cas).

A long terme, l’arthrose est exceptionnelle.

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